La Belle & le Diabète


 

Si votre fils ou votre fille a récemment reçu un diagnostic de diabète, cette histoire est pour vous. Gisèle nous montre qu’on peut avoir une vie heureuse avec le diabète, et elle remercie sa famille d’être aimante et toujours là pour elle. Découvrez l’histoire de la Belle et comment sa bête, le diabète, a aussi un côté positif qui pourrait faire de lui ni plus ni moins qu’un prince.

BT1: Nous aimerions en savoir plus sur vous, ce que vous faites et où vous habitez.

Je suis Gisèle, j’ai 30 ans cette année et je vis dans un village entre Aix-en-Provence et Marseille. Ce qu’on retiendra : je suis à 25 minutes des Calanques ! J’ai quitté le monde de l’entreprise en 2018 pour me lancer en freelance dans la communication digitale, et je ne regrette en rien mon choix. Je suis plus sereine malgré les contraintes de l’auto-entreprenariat. Je compose mieux mon temps entre mon travail, mon Diabète et mes loisirs, et je suis nettement plus heureuse !

BT1: Souhaitez-vous nous raconter l’histoire de votre diagnostic et comment vous vivez aujourd’hui avec le diabète ?

On m’a diagnostiqué mon Diabète en Guyane Française, lorsque j’avais 6 ans. Plus exactement à Paris, puisqu’on a dû me rapatrier d’urgence. À l’époque on faisait nos injections en mélangeant des flacons de lente et rapide, deux fois par jour, et j’avais un régime alimentaire strict. Cela se passait à peu près bien, jusqu’au jour où on m’a annoncé que mon traitement était « préhistorique », en rentrant d’Afrique, lorsque j’avais 14 ans. J’étais ado, et soudainement, on m’a dit que je pouvais manger tout ce que je voulais, mais qu’il fallait me piquer à chaque fois (l’insulinothérapie fonctionnelle). À partir de là, tout est parti en vrille : mon HbA1c, qui restée scotchée entre 10 et 12% pendant plus de 10 ans, et mon poids, car j’ai pris 20 kg en 1 an.

J’ai toujours plutôt bien vécu mon Diabète car j’ai été élevée dans une famille aimante, qui s’est toujours pliée en quatre pour me soutenir et pour que je puisse tout faire. Mais je souffrais de ne pas réussir à m’équilibrer. Ça inquiétait aussi beaucoup ma mère, qui avait peur que je ne fasse pas assez d’efforts. Je refusais de porter une pompe à insuline, que j’assimilais à une sorte de perfusion qui sonnerait constamment à côté de moi. Bref. J’étais en combat contre mon Diabète.

Puis un jour, j’ai cheminé dans ma tête et accepté de porter une pompe patch, sans tubulure. J’ai découvert tous les réglages qui me manquaient sous stylos, et j’ai enfin réussi à dompter la bête.

Aujourd’hui je suis sous boucle fermée CamAPS FX, et même si à ce jour je dois la payer de ma poche, je ne changerai pour rien au monde. Cet algorithme est un allié puissant, et je me sens beaucoup plus apaisée et confiante en l’avenir. Pour moi, les ennuis sont derrière.

BT1: Vous sentez-vous différente maintenant que vous parlez ouvertement et que vous partagez sur le diabète sur les réseaux sociaux ?

J’ai créé La Belle & le Diabète pour trouver un écho dans ma manière de vivre mon Diabète. Comme beaucoup, j’avais soif de partage et je me sentais seule. J’avais aussi envie de casser les codes du Diabète et communiquer autrement. En 2016, il n’y avait pas beaucoup de comptes sur le Diabète, et ceux qui existaient n’étaient franchement pas drôles. J’ai donc commencé à publier des illustrations et infographies sans jamais parler de moi ou montrer mon visage. Pour moi, la Belle & le Diabète c’était pour les autres.

Puis lorsque la page s’est développée et que j’ai commencé à entretenir un véritable lien avec mes abonnés, j’ai eu envie de partager davantage sur mon histoire. Tout est devenu plus intime. Aujourd’hui, je publie toujours des illustrations, et j’écris surtout des articles informatifs ou lifestyle sur mon site internet. Mais lorsque je poste des photos de moi, ce sont essentiellement les parents d’enfants diabétiques qui me remercient de partager. Car me voir vivre une vie épanouie et heureuse les rassure. Je suis beaucoup plus à l’aise avec tout ça.

La Belle & le Diabète est très thérapeutique pour moi. Je me sens utile, et c’est un immense honneur lorsque j’écris sur un sujet qui me tient à cœur, et que j’arrive à toucher les autres.

BT1: Comment avez-vous trouvé le nom intelligent “La Belle et le Diabète” ? Le diabète peut-il être une bête ? Et peut-il devenir une bonne bête, si nous le traitons avec amour ?

Lorsque j’ai décidé de créer cette page, je cherchais un nom avec le mot « Diabète », afin qu’on puisse me trouver facilement. Mon père et moi, avec qui je suis très complice, étions en train de plaisanter sur des jeux de mots plus ou moins douteux avec le Diabète, lorsque « La Belle & le Diabète » est sorti. J’ai immédiatement senti qu’on tenait quelque chose de fort et d’amusant. Lorsque je l’ai annoncé à mon père, il m’a dit «certains pourront penser que c’est toi la Belle, mais on sait tous les deux la vérité ». L’amour paternel…

Mon Diabète est définitivement un monstre. Il est absolument infecte. J’ai longtemps pensé qu’il suffirait que j’ai une hygiène de vie irréprochable pour l’apaiser. Mais lorsque j’ai tout mis en place, j’ai compris qu’il était insatiable.

En réalité, mon Diabète peut être les deux : une bête, et un prince. Grâce à lui, j’ai rencontré des gens fantastiques, j’ai commencé cette aventure avec mon blog, et cela a même fait naître ma vocation professionnelle. Je sais qu’il m’a rendue forte et bienveillante, et je suis fière de ma résilience.

Mais pour être honnête, je pense que mon Diabète est une bête. Il ressemble à une bête, il agit comme une bête, les autres savent que c’est une bête. Il n’y a que moi, au fond de mon cœur, qui sait que c’est aussi un prince. Et ça me plait.

BT1: Quel message voudriez-vous faire passer sur cette maladie chronique ?

J’ai commencé La Belle & le Diabète dans le but de lutter contre les préjugés entre type 1 et type 2. Cela me rendait folle d’entendre les media confondre les deux, et qu’on me fasse des réflexions du genre « mais t’es pas si grosse », « t’as le droit de manger ça ?», « ah, comme ma grand-mère »…et j’en passe.

Mais au fil de cette aventure, j’ai changé d’objectif. Je pense que chaque DT1 est capable d’éduquer son entourage et renseigner ses proches, du moment où il se sent en phase avec son Diabète. Bien vivre avec son Diabète, c’est bien vivre tout court. Et pour ça, je pense qu’il faut oser en parler, s’exprimer, accepter d’être mal, de se sentir coupable, d’être honteux, pour ensuite se sentir mieux, légitime et fier. Bien vivre avec son Diabète, c’est une aventure, et ça s’apprend chaque jour. Ensemble, c’est mieux.

Mon message s’adresse donc aux DT1 : Soyez fiers de vous, et continuez d’avancer, vous le valez bien.

 

BT1: Que faites-vous et comment faites-vous sur les réseaux sociaux pour transmettre ce message ?

J’essaie de montrer la réalité du terrain, dans ses bons ET mauvais moments. Toutes ces situations qui nous arrivent à tous, et dont on ne parlait pas forcément. Échanger avec un DT1, c’est magique, car il comprend tout ce que vous dites. J’essaie également de rappeler qu’on se bat tous les jours, et que nous ne déméritons jamais, même en situation d’échec. On a tendance à oublier tout ce qu’on fait pour aller bien, et nous sommes très durs envers nous-même. Je rappelle aux autres diabétiques combien ils sont extraordinaires. C’est important de se valoriser de temps en temps. D’ailleurs j’ai parfois des gentils messages d’abonnés qui me rendent la pareille, j’adore.

BT1: Quel est pour vous le rôle de la technologie dans notre qualité de vie ?

Vous parlez à une utilisatrice de boucle fermée. J’ai un capteur connecté, et une pompe à insuline qui discutent avec une intelligence artificielle pour m’aider à gérer mon Diabète. Sans toute cette technologie, j’aurais encore une HbA1c à 10%, et certainement des complications. C’est vrai que cela demande une organisation, et qu’il faut porter tout ce beau monde sur sa peau, mais personnellement, je trouve que ce n’est pas très cher payé. Depuis que je suis sous boucle fermée, ma phrase préférée, c’est « ah, j’ai oublié que j’étais diabétique ». Ma charge mentale a été divisée par deux grâce à la technologie. Je l’encense. Je l’aime ! Je la vénère, même !

 

BT1: Selon vous, qu’est-ce qui vous rend unique en France et différent des autres en matière de diffusion sur le diabète ?

Il y a quelques années j’aurais répondu sans hésitation que j’étais la seule à écrire des articles de blog, et que ma patte graphique me sortait du lot. J’ai également une facilité à m’exprimer par écrit, et beaucoup trouvent un écho à ce qu’ils ressentent dans mes articles. Aujourd’hui c’est un peu différent, car les comptes sur le Diabète ne cessent de fleurir, et j’ai l’honnêteté de remarquer que certains se débrouillent très bien. Je pense qu’on n’a pas besoin d’être le meilleur pour exister. Bien sur ça me fait de la peine quand je travaille sur quelque chose et que ça fait un flop… Mais même si cela n’a touché que quelques personnes, en réalité, c’est un succès, non ?

BT1: Où pouvons-nous vous trouver en ligne et quel est votre blog ?

Mon blog est le suivant : www.labelleetlediabete.com et je suis présente sur Facebook et Instagram.

WRITTEN BY Lucía Feito Allonca de Amato, POSTED 05/27/22, UPDATED 05/27/22

Lucy vit avec le diabète de type 1 depuis 30 ans, a la double nationalité espagnole et argentine et est diplômée en droit de l'Université d'Oviedo. C'est une partie active de la communauté du diabète en ligne, un sujet dans lequel il est constamment mis à jour. Il est également patient expert en maladies cardio-métaboliques chroniques de l'Université Rey Juan Carlos et militant pour les droits des personnes de la communauté LGBTQ+.